2015-10-05

La période du dîner, parlons-en!


Chargée de projets et sociologue de formation, ma mission est de mettre en valeur les conditions pour améliorer la convivialité de la période du repas. C'est à l'Association des services de garde en milieu scolaire du Québec que j'ai le plaisir de travailler.

Cet espace a pour but de concilier pratique et passion, c'est donc dire que je m'offre un espace d'échange et de réflexion sur notre rapport à ce moment inéluctable de notre quotidien: la période du dîner. Un moment chargé d'intensité, de sens et de contradiction, qu'en pensez-vous?

À quoi ressemble la période du dîner dans une école primaire aujourd'hui? Si vous êtes l'une des milliers de personnes oeuvrant en garde scolaire, vous en avez déjà une petite idée, disons plutôt une excellente idée! Mais, que sait la population au juste? Et que sait-on des bons coups réalisés dans l'école voisine, des difficultés qui sont souvent les mêmes à l'autre bout de la province. Et si, pour une fois, on en discutait ensemble?

Manger n'est pas banal

Manger, c'est tout sauf banal. Si la nourriture et l'alimentation ont d'abord une fonction biologique, c'est surtout leur caractère social qui guide nos conduites et influence nos représentations. Lorsque l'on pense au repas, on pense tout de suite au repas familial. Tel qu'il est aujourd'hui, le repas familial n'a pas toujours existé, il est apparu, suite à une longues séries d'évolution, en France au XVIIIe siècle sous la forme qu'on lui connaît à présent (c'est-à-dire une réunion familiale avec ses horaires fixes et ses trois services). L'image du repas familial est forte, vous avez sûrement en tête le souvenir des repas que votre mère vous servait autrefois, peut-être même celui des repas pris chez votre grand-mère le dimanche. Et pourtant, les repas ressemblent-ils toujours à cela?

En raison d'importants changements sociaux, ce repas est en déclin et les causes sont nombreuses. Seulement pour celles liées au monde du travail pensons à l'entrée massive des femmes sur le marché du travail, des changements de structure et des distances toujours plus grandes à parcourir entre la maison et son lieu de travail. Ces mêmes causes sont aussi à l'origine de l'apparition des services de garde et de la période du repas dans les écoles (c'est d'ailleurs comme cela que tout a commencé). Aujourd'hui, la période du repas est parfois synonyme de stress, de course contre la montre et est perçue comme une nécessité, alors qu'au même moment cette période peut toujours être la source de partage en famille ou entre amis, de convivialité et un moment de pause bien mérité.

Manger, c'est bien plus que s'alimenter, c'est consommer et se définir, en d'autres mots c'est exprimer ses valeurs, c'est aussi être confronté à celles des autres. Participer à ce rituel qu'est l'alimentation des autres est définitivement une responsabilité chargée de sens. Jongler avec les contraintes issues de la gestion des ressources matérielles, humaines et temporelles afin d'en préserver la convivialité est admirable.

La période du dîner, parlons en

La période du dîner dans les écoles vous touche de près ou vous vous sentez concernés, n'hésitez pas à partager. Ici, la parole est à vous.

Le temps de dîner, temps de pause ou course contre la montre?

Dîner à l'école pour les enfants d'âge préscolaire et primaire est devenu la norme. Le personnel en garde scolaire  sait à quel point chaque élément de cette période forme, en quelque sorte, un château de cartes dont l'équilibre est précaire. Mais tous ne savent pas à quel point la gestion de cette période peut être complexe.

À l'automne 2014, un groupe d'étudiants en architecture et leurs professeurs s'est penché sur la question. Après la visite de sept écoles, plusieurs constats se sont imposés, des constats qui sont corroborés avec les données d’enquête du Portrait de la période du dîner. Nous nous arrêterons ici sur l'organisation de la période du dîner.


Premier constat - Dîner à l'école est aujourd'hui la norme

La gestion du temps et de l'espace lors de la période du dîner dans les écoles dépend du nombre d'élèves présents et de l'espace et du type de locaux disponibles dans l'école.













Dans les exemple mentionnés, les locaux que ces écoles utilisent pour faire manger tous les élèves sont: local du service de garde, salle polyvalente, bibliothèque, salle d'informatique, salle de musique, classe, local libre, gymnase et cafétéria. Seulement une des écoles de l’échantillon disposait d’une cafétéria.

Les données de l’enquête nous apprennent que plus de la moitié des répondants scindent la période du dîner en plus d’une plage horaire, généralement deux ou trois, mais parfois jusqu’à quatre. Cette situation est généralisée lorsqu’un grand nombre d’élèves est présent le midi, puisqu'à partir de 500 élèves le midi, ce sont les trois quarts des répondants disent diviser la période. L’enquête nous apprend aussi que seulement 15% des élèves prendraient  leur repas dans un local de cafétéria ou un local aménagé à cet effet. Il n’existe toutefois pas de solution miracle, puisque disposer d’un local pour le repas ne règle pas tout.

« Les périodes de repas des trois dîners qui se déroulent à la cafétéria nous obligent à presser les enfants à manger pour libérer la cafétéria dans le temps prescrit. »

Deuxième constat - une période de dîner peut engendrer des événements stressants

À la lumière des observations effectuées, voici un exemple type de l'organisation spatio-temporelle d'une période du dîner de 90 minutes. Ainsi divisée, la période du repas est dorénavant écourtée tant pour les élèves que pour le personnel en garde scolaire et peut engendrer des événements stressants et peu propices au développement de saines habitudes de vie, à la socialisation avec les pairs et à la détente ou au repos.




17 % des répondants de l’enquête estiment que la possibilité pour les enfants de pouvoir manger à leur rythme est un obstacle important à la convivialité de la période du repas. C’est la deuxième dimension qu’ils souhaiteraient améliorer en priorité pour apporter plus de convivialité.

Les fours à micro-ondes sont-ils en cause? 15 % des répondants ont affirmé qu’ils représentent un obstacle important, des données qui pourraient être plus élevées, puisqu’environ 25 % ont affirmé ne pas avoir de fours à micro-ondes.

« Nous n’avons plus de fours à micro-ondes depuis cette année. La qualité de service des éducatrices [s’est] grandement amélioré, car elles sont toujours disponibles et n’ont plus à s’inquiéter à ce que tout le monde ait son repas chauffé avant la fin de la période. »


Une question d'équilibre

Qu’ils soient contraints par le temps ou principalement par l’espace, les services de garde en milieu scolaire ont mis en place différentes stratégies pour améliorer la convivialité. Quelles sont celles qui, pour vous, conviennent le mieux. Lesquelles vous permettent de maintenir l’équilibre ?


Les discussions entourant la période du dîner sont loin d’être terminées, toutefois nous espérons qu’elles trouveront cette fois-ci un écho particulier. La diffusion du portrait fait son chemin, il en a même été question dans La presse + et à Bien dans son assiette, sans compter la diffusion par des réseaux de veille en saines habitudes de vie ou en lien avec l’éducation.


Vous reconnaissez cette situation ou vous avez envie d'en savoir plus, rendez vous sur notre site et consultez le bulletin complet Bulletin d'information numéro 1.